Meditation de la Parole du 11ème dimanche du temps ordinaire,année B

Ez 17,22 -24 ; Ps 91,2-3,13-14, 16-16; 2CO5, 6-10 ; Mc 4, 26-34

Une fois semé dans le cœur de l’homme, le royaume de Dieu grandit de lui-même. Telle est d’ailleurs la conviction que véhicule la première lecture de ce dimanche quand le prophète fait parler le Seigneur en ces termes : « Je suis le Seigneur, j’ai parlé, et je le ferai ». Autrement dit, le Seigneur fait ce qu’il dit et n’y a pas de différence entre ce que Dieu dit et ce que Dieu fait, dans la mesure où il est dans sa parole, disait André Marlé. De fait, la croissance du royaume est une merveille de Dieu aussi grande et aussi belle que la croissance des plantes est grande et belle, et aussi mystérieuse que la transformation d’un enfant qui grandit et devient un homme.
Ainsi, la croissance du Royaume de Dieu ne dépend pas des forces humaines, elle dépasse les capacités humaines car elle possède son propre dynamisme. Ce message est un message d’Esperance. Et saint Paul dans la deuxième lecture parlera de la confiance, car, en adoptant une perspective humaine, nous pourrions douter du triomphe du Royaume de Dieu. Il se heurte à de nombreux obstacles parmi lesquels notre corps (cf. 2e lecture). Il est rejeté ici, rejeté là-bas ou dans de nombreux endroits, totalement inconnu. Nous constituons nous-mêmes un obstacle à la réalisation du royaume de Dieu avec notre mauvaise volonté et nos péchés. Il est donc bon que nous sachions que, petit à petit, avec une logique qui n’est pas humaine, avec un rythme qui nous semble trop lent, le royaume de Dieu grandit. Saint Paul, inspiré, percevait déjà les gémissements de cette croissance (Rm 8,19-22). Il faut garder espoir (He 3,6b). Nous devons répéter chaque jour : « que ton règne vienne ». Il faut cultiver la patience, celle du semeur qui ne peut hâter le temps de la moisson (Jc. 5, 7-8). Il ne faut surtout pas douter de la réalité de l’action de Dieu dans le monde et dans nos cœurs. Tel est d’ailleurs le sens et le contenu de la foi chrétienne. Jésus nous dit cela parce qu’il sait que le plus grand danger pour nous est de perdre patience, mieux de perdre confiance, de se décourager, d’abandonner le chemin et de s’arrêter. Nous ne connaissons ni le jour ni l’heure de notre entrée dans le royaume ou du retour du Christ. Les vendanges semblent encore très loin, mais le temps passe vite : les vendanges : c’est peut-être demain, la rétribution aussi.

A la découverte des Père Cappadociens
On donne le nom de « Pères cappadociens » aux trois grands évêques du IV siècle de la province romaine de la Cappadoce : Basile le Grand, son frère Grégoire de Nazianze, et Grégoire de Nysse. On leur ajoute parfois le quatrième : Amphiloque d’Iconium. Leur importance pour la politique ecclésiale de cette époque ainsi que pour le développement de la théologie sont exceptionnelles. Ils faisaient partie d’une élite dirigeante de l’Eglise, nouvellement constituée, après ce qu’on appelle le « tournant constantinien », au cours du IV siècle. Cette élite se recrutait dans les familles qui non seulement confessaient la foi chrétienne depuis plusieurs générations, mais qui avaient aussi activement contribué à donner forme à la vie de l’Eglise. Ils faisaient partie des couches sociales supérieures, aisées et influentes, et bénéficiaient d’une formation scolaire remarquable, ce qui normalement les prédestinait aux carrières officielles classiques de rhéteurs, d’avocats ou d’hommes d’Etat. Basile s’est distingué surtout comme un excellent politicien ecclésiastique ; Grégoire de Nazianze, comme rhéteur chevronné et fin théologien.
Ces grands cappadociens renoncèrent tous les trois à leur carrière profane, non pas pour une carrière ecclésiastique, mais pour suivre le Christ de façon radicale, en s’adonnant à une vie ascétique et solitaire. Tous trois furent cependant appelés à l’épiscopat, parce que, en raison de leur origine et de leur formation exceptionnelle, ils étaient capables d’assumer la tâche de direction responsable de l’Eglise dans cette époque troublée du IV siècle.
I. SAINT BASILE
I. 1. Biographie
Basile naquit en 329 à Césarée, capitale de la Cappadoce (centre de la Turquie actuelle, pays très rude aux hivers rigoureux). Sa famille était toute particulière. Le grand-père maternel de Basile avait subi le martyre lors de la persécution de Dioclétien. La grand-mère paternelle, Macrine l’Ancienne, avait été l’élève de Grégoire le Thaumaturge (catéchisé par Origène !). Pendant les persécutions, Macrine avec son mari, après avoir subi la confiscation des biens, étaient obligés de se cacher dans les montagnes pendant presque 7 ans.
Son père Basile l’Ancien, rhéteur à Néocésarée et riche propriétaire foncier, faisait partie de la noblesse sénatoriale ; sa mère Emelie était issue, elle aussi, d’une riche famille cappadocienne. Les parents de Basile eurent 10 enfants : cinq filles dont l’aînée Macrine la Jeune et cinq fils, dont trois futurs évêques : Basile, Grégoire et Pierre (futur évêque de Sébaste). Plusieurs membres de cette famille seront vénérés comme saints : la grand-mère Macrine, la mère Emelie et trois de ses fils : Basile, Grégoire et Pierre.
Basile doit sa formation classique initiale à son père, tandis qu’à sa grand-mère Macrine il doit sa formation religieuse : celle-ci se souvenant de l’enseignement de Grégoire le Thaumaturge, disciple d’Origène et évangélisateur de la Cappadoce, lui inculqua la théologie alexandrine. Mais, conformément à l’habitude de l’époque de reculer le baptême jusqu’à l’âge adulte, il ne fut pas baptisé à ce moment-là. Il fit ses études à Césarée, à Constantinople et à l’Académie d’Athènes où il fit la connaissance du futur empereur Julien et de Grégoire de Nazianze. Avec ce dernier il lia une profonde et durable amitié et Basile eut une influence déterminante sur le cœur de la vie de son ami. A son retour d’Athènes (356), Basile enseigne la rhétorique à Césarée. Rapidement il renonça à sa carrière pour se consacrer entièrement à Dieu dans la vie ascétique vécue de manière radicale. Il fut donc baptisé en 357, ordonné lecteur, vendit tous ses biens et, avec le bénéfice de la vente, constitua un fond pour venir en aide aux pauvres.
Il entreprend le voyage en Orient pour se familiariser avec les centres de la vie monastique de Syrie, de Mésopotamie, de Palestine et d’Egypte. Au retour, il s’installa dans la région de Pont, dans une des propriétés familiales sur le fleuve Iris. Une communauté monastique se regroupa autour de lui, qui servira de modèle à d’autres fondations. Il y vivra cinq ans, et c’est de là qu’il écrit sa célèbre « Lettre 2 à Grégoire de Nazianze ». Grégoire viendra le rejoindre et avec sa collaboration ils prépareront la Philocalie, une anthologie de textes spirituels d’Origène. Basile mène avec des compagnons la vie cénobitique conforme à l’idéal évangélique organisant une vie de prière, d’étude et de travail manuel. Pendant cette période il fonda plusieurs monastères, se montrant ainsi un excellent homme d’action.
Mais il ne sera pas donné à Basile de terminer sa vie dans la retraite monastique. L’évêque de Césarée, Eusèbe, le convainc à accepter le sacerdoce (364) pour le service de l’Eglise qui a urgemment besoin de ses compétences. En 370 il succéda à l’évêque de Césarée et devient le métropolitain de la province de la Cappadoce et du Pont. Il acquit très vite affection de ses diocésains, fonda les hôpitaux pour les malades et les victimes des épidémies, les hospices pour les voyageurs et les étrangers.
Son principal souci fut la consolidation de l’unité ecclésiale en Orient et celle de l’Orient avec Rome, surtout après la mort d’Athanase : « Toute l’Eglise se désagrège, elle se déchire partout comme un manteau usé ». C’est dans ce climat de confusion qu’il nomme son frère Grégoire, évêque de Nysse et son ami Grégoire, évêque de Sasimes. Il est mort 1 janvier 379, âgé d’à peine cinquante ans, sans avoir vu de ses propres yeux le triomphe de la foi orthodoxe. Deux ans plus tard, le concile de Constantinople réalisera la paix tant espérée dans l’Eglise. Basile y a contribué largement.
I. 2. Ecrits.
Basile, malgré ses multiples tâches accaparantes reste le grand théologien. Ses écrits sont de grande valeur littéraire et théologique.
Ecrits dogmatiques. Tous les traités dogmatiques sont consacrés à la lutte contre l’arianisme. Le premier c’est « Contre Eunome », composé entre 363-365, réfute la pensée d’Eunome, chef de fil d’un courant radical arien. Il clarifie la terminologie théologique pour mieux exprimer le dogme trinitaire. Un autre ouvrage : « Sur l’Esprit Saint » où il traite de la consubstantialité du Fils et de l’Esprit avec le Père. Il y affirma sans ambages la divinité du Saint Esprit. Il souligne, comme Athanase le rôle sanctificateur de l’Esprit.
Ecrits ascétiques. D’abord les « Règles morales » (Moralia) : une collection de 80 règles ou instructions morales basées sur le NT. L’ouvrage s’adresse à tous les chrétiens sans distinction. Il y a ensuite les deux Règles monastiques : petite et Grande (Petit asceticon et Grand Asceticon). Il s’agit d’une collection des textes qui régule la vie d’une communauté monastique soi au plan disciplinaire, soit au plan spirituel.
Traités pédagogiques. D’abord Exhortation aux jeunes gens sur la manière de tirer profit des auteurs hellénistiques ; il y traite de l’attitude chrétienne à l’égard de la littérature et de l’enseignement païen.
Homélies et sermons. Basile n’écrivit pas, comme ses grands contemporains, de commentaires sur l’Ecriture, mais il déploya ses talents d’exégète dans de nombreuses homélies. D’abord Sur Hexameron, c’est une collection de neuf homélies de carême, c’est un excellent ouvrage sur la conception chrétienne du monde et de la création. Il y a Homélies sur les Psaumes, 18 homélies environs ; Commentaire sur Isaïe.
Lettres. Il y a un corpus de 365 lettres de Basile. Elles traitent des sujets très diverses : dogmatiques, ascétiques, historiques et les lettres d’amitié, de consolation, lettres canoniques et liturgiques.
Liturgie de Basile. La tradition universelle de l’Eglise orientale lui attribue la Liturgie dite « de saint Basile » (qu’on utilise surtout les dimanches de Carême). Le texte dans son inspiration peut remonter à Basile, mais on ne peut pas admettre qu’il a été formulé tel qu’il est par lui, car il y a des éléments qui manifestent la théologie postérieure.


Abbé Séraphin OBAME NDONG

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