
Contexte :
Owono, un jeune collégien curieux, pose des questions à son oncle maternel, Moussavou, professeur d’histoire-géographie. Ils discutent des cinq républiques du Gabon et du passage à la Cinquième République.
Dialogue :
Owono : Tonton Moussavou, depuis la fin de l’élection présidentielle du 12 avril dernier, à la télé, sur Facebook et même dans les taxi bus, j’entends parler de la « Cinquième République ». Qu’est-ce que ça veut dire ? Est-ce que le Gabon a déjà eu plusieurs républiques ?
Moussavou : Oui, Owono, c’est une très bonne question ! Imagine que le Gabon ait changé plusieurs fois ses règles de fonctionnement, un peu comme les différentes versions des PlayStation : la PS1, la PS2, jusqu’à la PS5. À chaque nouvelle version, il y a des améliorations, mais l’objectif reste le même : jouer, comme avant, mais avec une technologie plus avancée.
Dans un pays, c’est pareil : lorsqu’on change les règles importantes pour mieux organiser la gestion du pays, on parle d’une nouvelle République. Depuis son indépendance, le Gabon a eu cinq Républiques, chacune avec sa propre façon de gouverner.
Owono : Ah bon ? Alors, raconte-moi !
Moussavou : Après l’indépendance du Gabon, le 17 août 1960, nous avons eu la Première République. À cette époque, le pays fonctionnait avec un régime parlementaire, ce qui voulait dire que : le président de la République, qui était aussi le Premier ministre, devait rendre des comptes au parlement (Assemblée nationale). Et si le parlement jugeait que le Premier ministre ne faisait pas bien son travail, il pouvait le remplacer en votant contre lui.
Owono : Et qui était président et Premier ministre à ce moment-là ?
Moussavou : C’était Léon Mba. Mais il n’aimait pas cette règle, car elle lui permettait d’être remplacé.
Owono : Donc, il n’était pas vraiment le chef du pays ?
Moussavou : Exactement ! Léon Mba voulait plus de pouvoir et ne voulait pas que le parlement puisse le renverser. Alors, le 21 février 1961, une nouvelle Constitution a été adoptée. Le poste de Premier ministre a disparu, et le président est devenu le seul chef du gouvernement.
Owono : Après ça, plus personne ne pouvait le remplacer ?
Moussavou : C’est bien ça ! C’est ainsi que la Deuxième République a commencé en 1961. À partir de ce moment, Léon Mba dirigeait seul, et le parlement ne pouvait plus le remplacer.
Mais Léon Mba est mort le 28 novembre 1967, et son vice-président, Albert Bernard Bongo, lui a succédé en prêtant serment le 2 décembre 1967. Pour que tu ne te perdes pas, Albert Bernard Bongo a changé son nom pour devenir Omar Bongo, après s’être converti à l’Islam le 2 mars 1973.
Owono : Omar Bongo ! Je connais bien ce nom. Il a dirigé longtemps, non ?
Moussavou : Exactement ! À partir de 1968, sous sa direction, soit quelques mois après être devenu Président du Gabon, nous avons eu la Troisième République. Cette fois-ci, la grande différence, c’est qu’il n’y avait qu’un seul parti politique autorisé : le PDG (Parti Démocratique Gabonais).
Owono : Un seul parti ? Ça veut dire que les gens ne pouvaient pas voter pour qui ils voulaient ?
Moussavou : C’est ça ! Le système de parti unique, appelé monopartisme, était très courant en Afrique à cette époque. Les gouvernements disaient que c’était pour renforcer l’unité nationale et accélérer le développement. Mais en réalité, cela donnait trop de pouvoir à un seul parti, ce qui empêchait les gens d’avoir des choix réels lors des élections.
Beaucoup de Gabonais n’étaient pas d’accord avec ce système. Alors, entre la fin de l’année 1989 et le début de 1990, ils ont protesté pour obtenir plus de liberté et le droit de choisir leurs dirigeants.
Owono : Et ça a changé quelque chose ?
Moussavou : Oui ! Grâce à ces protestations, le droit de créer des partis politiques a été rétabli. Une nouvelle Constitution a été adoptée par référendum le 26 mars 1991, donnant naissance à la Quatrième République. Cette Constitution permettait aussi de limiter à deux le nombre de mandats du président de la République.
Owono : Mais alors, est-ce que les Gabonais étaient vraiment libres après ça ?
Moussavou : Oui et non. D’un côté, les Gabonais avaient maintenant plusieurs partis politiques et des syndicats. Mais, de l’autre côté, les élections étaient souvent truquées pour favoriser le parti du président, le PDG. Et Omar Bongo a ainsi continué à diriger jusqu’à sa mort le 8 juin 2009. Puis, son fils Ali Bongo a pris le pouvoir le 27 septembre 2009, et ce, jusqu’au 30 août 2023, date du coup d’État militaire qui a mis fin à son pouvoir.
Owono : Et maintenant, avec le président Oligui Nguema, c’est la Cinquième République ?
Moussavou : Oui, Owono ! La Cinquième République a commencé le 16 novembre 2024, après l’adoption de l’actuelle Constitution. L’objectif de cette Cinquième République, c’est de changer la manière dont le pays est gouverné. L’idée est de rendre les institutions de la République plus solides et plus justes. Et le président a reçu de nouveaux pouvoirs, un peu comme dans la Deuxième République C’est une tentative pour construire un Gabon meilleur en apprenant des erreurs du passé.
Owono : J’espère que cette fois, ça va marcher !
Moussavou : Moi aussi, Owono. Et c’est vous, les jeunes, qui devez comprendre ces changements et participer à la construction d’un Gabon plus juste et plus démocratique.
Owono : Merci beaucoup, Tonton Moussavou ! Je comprends beaucoup mieux l’histoire des Républiques du Gabon maintenant.
Moussavou : Je t’en prie, Owono ! Connaître notre histoire, c’est comprendre notre présent et mieux préparer notre avenir. À demain, je passerai voir ton père pour regarder ensemble le mat